Passeur d'âme
On ne devient pas passeur d’âme par la filière académique, pour la simple raison qu’il n’existe pas de chaire universitaire où s’enseigne cette vocation. Nous partons dans une vie de mystique, avec l’espoir de trouver sur son chemin les personnes qui sauront nous aider à définir clairement cet avenir et qui nous donneront les moyens de nous construire durant un parcours souvent bien plus long que celui d’une carrière académique.
On ne choisit pas d’être passeur d’âme, comme on ne choisit pas son destin. Nous l’endossons à mesure que l’on grandit dans la traversée des âges de la vie. Nous sommes simplement tous appelés à devenir le sujet dans le destin de notre existence. Le quotidien nous révèle cette destinée par étape successive, par les événements, les rencontres, par tous les instants où la vie fait résonner l'appel du destin, jusqu'à être apte de l'assumer et de l'épouser.
Soyons aimant de l’homme, autant que de l’humanité des individus. Je parlerai "des humanités", par respect de l’expression singulière qu’elle prend en chacun. Accorder l'écoute et l'accompagnement à une personne est une pratique se rapportant à l'individu, à son devenir sujet dans son existence, à celui de son mystère, là où se transcende les présupposés, les prêts à penser, dans une marche menant la personne à rencontrer la poétique sacrée de sa présence dans le monde pour qu'elle puisse s'unir à elle.
S'engager dans une telle voie fait bien souvent de l'existence celle d'un parcours de vie atypique, aux détours de situations inattendues où se révèlent des réalités insoupçonnées. La trajectoire s'y vivant donne parfois l’impression d'un égarement dans les méandres mystérieux de l'esprit humain, où tout semble devoir se créer, se découvrir, mais, jamais on se perd. Nous ne vivons pas des périodes d’errance, nous apprenons à nous situer dans les labyrinthes que nous traversons et travaillons à reconnaître les voies par lesquelles la personne dépasse la raison normative en advenant sujette à elle-même. Nous aurons à développer une confiance fraternelle avec les personnes que nous accompagnons. Ce faisant, nous avons besoin de connaître en profondeur le proche de notre propre mystère d'être pour approcher celui de l’autre et sentir, dans le jeu des résonances, comment l’accompagner.
C’est un discours différent de ceux enseignés dans les disciplines académiques. Il permet une approche autre, non-intellectuelle de l'existence. C’est dans l’apprentissage du discernement du champ vibratoire que nous développons notre entendement et travaillons la sensibilité de la perception dont nous avons besoin. Notre école est celle de l’éveil de l’intelligence sensorielle et de son discernement. Bien sûr arrivera le jour où se manifestera la nécessité d’apprendre à verbaliser les acquis de la vaste connaissance des champs vibratoires acquise afin de l’exprimer intelligiblement avec d’autres. C’est là, la deuxième partie de notre apprentissage. Elle prendra une forme plus livresque, plus intellectuelle. C’est une étape essentielle pour trouver la manière de nommer au plus juste les connaissances issues de notre intelligence sensorielle. Nous apprenons à traduire en verbe la parole indicible de ce bagage au travers d’enseignements, de formations, d’études, et de pratiques supervisées. Ce cycle secondaire prend d'autant plus d'importance si nous sommes appelés à intervenir dans les milieux institutionnels. Ces lieux de soins fonctionnent sur un discours référencé, précis et concis, et enraciné dans les savoirs académiques.
Lorsque l’on travaille avec l’intelligence du corps, on s’intéresse à son langage. Sa nature est vibratoire, sensorielle, sensuelle, émotionnelle, réactionnelle. Elle est la réponse du corps au champ infini de fréquences existant dans l’univers. C’est dans ce creuset que nous développons l’écoute des résonances, des dissonances, des harmonies et des enharmonies. Nous sommes les abeilles butinant cette magistrale floraison vibratoire. Il reste de cette collecte, un langage préalphabétique, préverbal, intime, singulier, avec lequel nous élargissons notre capacité perceptuelle. Notre corps est une simple toile sensible dont la trame est traversée par le flux vibratoire des instants. Sans faire l'apprentissage de notre propre discernement sensoriel, nous serions seulement capables de percevoir un champ diffus et indifférencié, semblable à la soupe cosmique présente à l’origine de l’univers. Nous faisons chacune et chacun, à notre manière, ce voyage ontologique afin d’apprendre à analyser et à clarifier notre perception.
J’ai commencé ma vie de passeur d'âme par plusieurs années comme "indépendant" avant de rejoindre les aumôneries des hôpitaux universitaires genevois où j’ai été actif durant 6 ans. Ces années furent très importantes dans la manière de me positionner dans le milieu institutionnel et dans le discours à y tenir, par le bénéfice que j'ai acquis lors des supervisions, des formations continues, des colloques, des congrès et autres cycles d’études académiques ou "postgrade". Je reste profondément en gratitude de ce que j'ai reçu durant ces années. Ce bagage m'a grandement aidé à travailler la relation entre les différentes sémantiques, réalisant le minutieux ajustement de l’intelligence sensorielle à celle de la raison intellectuelle.
Le monde associatif est un lieu important pour la santé humaine et sociale. C’est un espace souvent non officiel, non institutionnel, et où les humanités de demain se révèlent. Il est essentiel d’y participer pour entendre les multiples souffrances échappant aux oreilles des institutions. Les associations du domaine de la santé et du social sont indispensables à l’éveil de la connaissance, à l’évolution de la vie sociale et à son équilibre. J'aime à dire que les associations sont les oreilles et manquent au monde institutionnel dont sa raison est fondée sur les acquis pérennes. Cet important vecteur sociétal révèle les multiples problèmes échappant aux radars des instances officielles. Me concernant, ma participation à la vie associative s’est accrue de 1995 à 2017. Durant ces deux décennies, j’ai étroitement collaboré avec les institutions médicales dans le domaine de la santé mentale au travers de diverses associations auxquelles j’ai soit participé à leur création, soit soutenue, soit rejoins celles existant déjà.
Je m'exprime à la première personne du pluriel, car je ne suis pas un cas isolé, d’autres vivent cette mystique, même si tous ne s’engageront pas dans une vocation de passeur d’âme ou d’une autre. Ce qui m’émerveille dans cette réalité est qu’elle ne dépend pas de la petite volonté individuelle, mais d’une bien plus grande, qui a pour nom la Vie avec son grand V. De ce grand cirque et dans son intelligence supérieure, cette présence crée les circonstances opportunes pour répondre à ses besoins. Nous n’en sommes que ses serviteurs.
François Ledermann
On ne choisit pas d’être passeur d’âme, comme on ne choisit pas son destin. Nous l’endossons à mesure que l’on grandit dans la traversée des âges de la vie. Nous sommes simplement tous appelés à devenir le sujet dans le destin de notre existence. Le quotidien nous révèle cette destinée par étape successive, par les événements, les rencontres, par tous les instants où la vie fait résonner l'appel du destin, jusqu'à être apte de l'assumer et de l'épouser.
Soyons aimant de l’homme, autant que de l’humanité des individus. Je parlerai "des humanités", par respect de l’expression singulière qu’elle prend en chacun. Accorder l'écoute et l'accompagnement à une personne est une pratique se rapportant à l'individu, à son devenir sujet dans son existence, à celui de son mystère, là où se transcende les présupposés, les prêts à penser, dans une marche menant la personne à rencontrer la poétique sacrée de sa présence dans le monde pour qu'elle puisse s'unir à elle.
S'engager dans une telle voie fait bien souvent de l'existence celle d'un parcours de vie atypique, aux détours de situations inattendues où se révèlent des réalités insoupçonnées. La trajectoire s'y vivant donne parfois l’impression d'un égarement dans les méandres mystérieux de l'esprit humain, où tout semble devoir se créer, se découvrir, mais, jamais on se perd. Nous ne vivons pas des périodes d’errance, nous apprenons à nous situer dans les labyrinthes que nous traversons et travaillons à reconnaître les voies par lesquelles la personne dépasse la raison normative en advenant sujette à elle-même. Nous aurons à développer une confiance fraternelle avec les personnes que nous accompagnons. Ce faisant, nous avons besoin de connaître en profondeur le proche de notre propre mystère d'être pour approcher celui de l’autre et sentir, dans le jeu des résonances, comment l’accompagner.
C’est un discours différent de ceux enseignés dans les disciplines académiques. Il permet une approche autre, non-intellectuelle de l'existence. C’est dans l’apprentissage du discernement du champ vibratoire que nous développons notre entendement et travaillons la sensibilité de la perception dont nous avons besoin. Notre école est celle de l’éveil de l’intelligence sensorielle et de son discernement. Bien sûr arrivera le jour où se manifestera la nécessité d’apprendre à verbaliser les acquis de la vaste connaissance des champs vibratoires acquise afin de l’exprimer intelligiblement avec d’autres. C’est là, la deuxième partie de notre apprentissage. Elle prendra une forme plus livresque, plus intellectuelle. C’est une étape essentielle pour trouver la manière de nommer au plus juste les connaissances issues de notre intelligence sensorielle. Nous apprenons à traduire en verbe la parole indicible de ce bagage au travers d’enseignements, de formations, d’études, et de pratiques supervisées. Ce cycle secondaire prend d'autant plus d'importance si nous sommes appelés à intervenir dans les milieux institutionnels. Ces lieux de soins fonctionnent sur un discours référencé, précis et concis, et enraciné dans les savoirs académiques.
Lorsque l’on travaille avec l’intelligence du corps, on s’intéresse à son langage. Sa nature est vibratoire, sensorielle, sensuelle, émotionnelle, réactionnelle. Elle est la réponse du corps au champ infini de fréquences existant dans l’univers. C’est dans ce creuset que nous développons l’écoute des résonances, des dissonances, des harmonies et des enharmonies. Nous sommes les abeilles butinant cette magistrale floraison vibratoire. Il reste de cette collecte, un langage préalphabétique, préverbal, intime, singulier, avec lequel nous élargissons notre capacité perceptuelle. Notre corps est une simple toile sensible dont la trame est traversée par le flux vibratoire des instants. Sans faire l'apprentissage de notre propre discernement sensoriel, nous serions seulement capables de percevoir un champ diffus et indifférencié, semblable à la soupe cosmique présente à l’origine de l’univers. Nous faisons chacune et chacun, à notre manière, ce voyage ontologique afin d’apprendre à analyser et à clarifier notre perception.
J’ai commencé ma vie de passeur d'âme par plusieurs années comme "indépendant" avant de rejoindre les aumôneries des hôpitaux universitaires genevois où j’ai été actif durant 6 ans. Ces années furent très importantes dans la manière de me positionner dans le milieu institutionnel et dans le discours à y tenir, par le bénéfice que j'ai acquis lors des supervisions, des formations continues, des colloques, des congrès et autres cycles d’études académiques ou "postgrade". Je reste profondément en gratitude de ce que j'ai reçu durant ces années. Ce bagage m'a grandement aidé à travailler la relation entre les différentes sémantiques, réalisant le minutieux ajustement de l’intelligence sensorielle à celle de la raison intellectuelle.
Le monde associatif est un lieu important pour la santé humaine et sociale. C’est un espace souvent non officiel, non institutionnel, et où les humanités de demain se révèlent. Il est essentiel d’y participer pour entendre les multiples souffrances échappant aux oreilles des institutions. Les associations du domaine de la santé et du social sont indispensables à l’éveil de la connaissance, à l’évolution de la vie sociale et à son équilibre. J'aime à dire que les associations sont les oreilles et manquent au monde institutionnel dont sa raison est fondée sur les acquis pérennes. Cet important vecteur sociétal révèle les multiples problèmes échappant aux radars des instances officielles. Me concernant, ma participation à la vie associative s’est accrue de 1995 à 2017. Durant ces deux décennies, j’ai étroitement collaboré avec les institutions médicales dans le domaine de la santé mentale au travers de diverses associations auxquelles j’ai soit participé à leur création, soit soutenue, soit rejoins celles existant déjà.
Je m'exprime à la première personne du pluriel, car je ne suis pas un cas isolé, d’autres vivent cette mystique, même si tous ne s’engageront pas dans une vocation de passeur d’âme ou d’une autre. Ce qui m’émerveille dans cette réalité est qu’elle ne dépend pas de la petite volonté individuelle, mais d’une bien plus grande, qui a pour nom la Vie avec son grand V. De ce grand cirque et dans son intelligence supérieure, cette présence crée les circonstances opportunes pour répondre à ses besoins. Nous n’en sommes que ses serviteurs.
François Ledermann
Genève, novembre 2021